dimanche 20 août 2017

"orientation sexuelle, controverse et science"

Un article passionnant ( Bailey et al.in: Psychological science in the public interest - 2016 ) trouvé en lien sur un super blog: mindhacks.com ( post "spike activity" du 29 avril 2016 )
90 pages quand même, disponible en pdf sur le site de l'article.
Un résumé des études scientifiques récentes sur les origines de l'homosexualité ( biologique ou culturelle? ) et les phénomènes qui s'y rattachent...
A l'origine une lettre ouverte à l'attention du président de l'Ouganda qui cherchait des arguments  pour "l'aider" à autoriser un renforcement des législations anti-homo sur une base scientifique.

Intéressant pour les homos qui veulent savoir "d'où ça vient" et se faire une idée de leur tau d'"homo-conformité" et pour les hétéros qui veulent dépasser les clichés ou leurs peurs. Même moi  qui m'intéresse beaucoup au sujet j'ai appris des trucs et revu certain clichés. Vous pourrez vous amuser à chercher des correspondances dans le livre...

  Ça commence par une définition de ce qu'est l'orientation sexuelle, composée de quatre critères:
- le comportement sexuel: avec qui on couche et ce qu'on fait.
- l'identité sexuelle: comment on se définit soi-même et comment on la présente aux autres.
- l'attraction sexuelle: degré d'attraction envers son sexe, le sexe opposé ou les deux.
- l'excitation sexuelle physique: qu'est-ce qui nous fait bander ou mouiller?

  C'est un article scientifique, alors ils coupent un peu les cheveux en quatre: ça parle d'homos, de lesbiennes et de bisexuels, avec un peu de transgenres ( brrrr...).

Précisions méthodoligues:
  Comment mesurer l'homosexualité? Les études sont de trois types, séparés ou combinés:
- Le "self report": entrevues basées sur des volontaires. Sujet au manque d'honnêteté des participants.
- Le "non self report": extraire des données sans aborder ouvertement la question de l'orientation sexuelle. Sujet à plus de confusions expérimentales.
- La mesure de l'excitation sexuelle physique - en gros des capteurs sur les parties intimes. Imparable, même si on peut dans une certaine mesure contrôler la réponse à ce qui nous excite vraiment. Très difficile par contre de feindre une réponse à ce qui ne nous excite pas...

Petit cours de terminologie politiquement correcte:
  Dire "homosexuel(le)" ou "gay"c'est tendancieux et ça crée des incompréhension culturelles avec le reste du Monde, c'est trop "occidental". Préférez:
"mâles androphiles" pour les hommes homos et "femelles gynéphiles" pour les lesbiennes. Dans cette terminologie, les hommes et les femmes hétéros sont des "mâles gynéphiles" et des "femelles androphiles"...

Deux types d'expression de l'homosexualité:
- le transgenre: les travestis, les hommes efféminés, les vieux avec les jeunes... Forme plus ancienne et plus "traditionnelle", universellement répandue dans le Monde . En gros l'homme joue à la femme...
- le cisgenre: deux hommes ou deux femmes "égaux" et en couple, pas trop typés... Une expression plus récente et occidentale.
Simple: les cisgenres s'identifient aux caractéristiques de leur propre sexe et les transgenre s'identifient aux caractéristiques du sexe opposé. Avec tous les degrés et variantes intermédiaires...

  Comme je supporte pas les féminins ni les travelos et que j'aime les mecs pour ce qu'ils sont sans pour autant me sentir une fille - vraiment, vraiment pas... - je suis donc un "mâle andropile cisgenre"...

Proportion et type de comportements homosexuels:
  Fait basique mais indispensable à connaître: la proportion d'homos et de bis dans la population totale, calculée principalement sur la population occidentale mais confirmée dans le reste du Monde. Oubliez le fameux "10 %"  et retenez ce chiffre: une personne sur vingt-cinq à une sur cinquante, - soit de 2/3 % à 5% max de la population - sont homos.
Voyez plutôt le graphique ci-dessous:


auteurs: Savin-Williams et Vrangalova 2013

  Conclusions: les chiffres que tout le monde - moi compris - a en tête sont très surestimés et les femmes sont beaucoup plus "floues" sexuellement que les hommes
  Autre observation: l'homosexualité masculine est beaucoup plus étudiée que l'homosexualité féminine et plus facile à cerner scientifiquement, plus "catégorique" aussi.

Les causes de l'homosexualité:
  Nature contre éducation - ça sonne mieux en anglais: " nature versus nurture " - , l'éternel débat entre l'inné et l'acquis. Pour info: les gens favorables aux homos ont tendance à croire aux origines biologiques et ceux qui leur sont hostiles aux causes "sociales" ou environnementales...

- Causes Biologiques:
  On est encore loin d'en voir le bout et tout un tas d'hypothèses se font concurrence.
  On peut commencer par se pencher sur le cas des autres animaux ( l'article dit "les animaux non-humains"...):
Des singes aux dauphins en passant par les oiseaux, des centaines d'espèces pratiquent occasionnellement l'homosexualité mais seulement très peu le font de manière habituelle, l'homme est donc dans ce domaine un cas rare mais non unique ( voir les oies grise de Konrad Lorenz...). Pour info, on est battu à plates coutures par les moutons: de 7 à 10% des béliers ne montent que des mâles, même quand ils ont le choix.
Les causes peuvent en être: un manque de partenaire ou des conditions environnementales inhabituelles, des pratiques"sociales" ( une gâterie pour apaiser le mâle supérieur...) plus ou moins détournées ( voir mon poste sur les oies gays de Lorenz ) et bien sûr des particularités bio-physiques. Ce dernier point mène droit à ce qui pourrait ne pas tourner rond chez les homos, sur le plan physique.
.Les hormones: testostérone and co, featuring les anticorps du corps maternel et leurs interactions avec les gènes du bébé homo. Forts soupçons contre les hormones androgènes prénatales. Joue apparemment plus pour les femmes que pour les hommes qui montrent moins de différences hormonales entre homos et hétéros... Les cerveaux des homos mâles seraient insuffisamment exposés aux androgènes au stade prénatal alors que ceux des homos femelles seraient trop "androgènés".  Cela crée des effets dits organisationnels qui contrarient le fonctionnement normal - hétérosexuel - du corps et surtout de possibles différences corporelles internes entre homos et hétéros et notamment à propos du troisième noyau interstitiel de l’hypothalamus antérieur ( INAH-3 en anglais ). Ça se trouve à la base du cerveau, région très ancienne héritée des mammifères et sensible aux androgènes qui déterminent sa taille; celui des femmes est deux fois plus petit que celui des hommes et celui des hommes homos serait plus petit que celui des hétéros... Pour les puristes ou les soupçonneux: la différence tient au volume de la région, pas au nombre de neurones dans la région concernée.
.Les gènes: dans ce domaine, la star récente était un certain "Xq28", à la pointe du chromosome X, dépassé depuis par certaines régions des chromosomes 7,8 et 10. Encore une fois, les différences génétiques menant à des orientation sexuelles non conformes semblent plus marquées et plus influentes chez les hommes que chez les femmes. Trouvaille intéressante: les hommes homos ont plus de chance que les autres d'avoir des parents ou ancêtres mâles homos...
D'après des études sur les jumeaux, la piste génétique semble expliquer 30% de l'homosexualité.

- Causes environnementales:
  Un avantage évolutif qui favoriserait la persistance d'une proportion stable d'homos dans la mer d'hétéros ou des choses plus étonnantes - mais vérifiées -  comme l'ordre de naissance pour les mâles ou encore le fait d'avoir de bons ou de mauvais parents...
.Causes évolutives: en tant que fondu de biologie et psychologie évolutionniste, ça me parle et il faut admettre que le paradoxe est de taille: comment un phénomène qui massacre le potentiel reproductif peut-il perdurer? Des indices ( peintures rupestres explicites ) d'homosexualité la font remonter aux hommes préhistoriques et il est établi que le phénomène est universel dans l'histoire et la géographie, l'homosexualité n'est donc pas nuisible au succès de l'espèce à défaut de lui être favorable... Une théorie voudrait que les individus homos soient plus protecteurs envers les enfants de leurs frères et sœurs hétéros et favorisent leur survie, mais la réalité mathématique montre qu'un homo devrait "sauver" de 5 à 8 neveux ou nièces pour compenser sa propre perte reproductive...
Peu probable et de toutes façons peu étudié. L'article ne le dit pas mais il me semble que la très faible proportion d'individus concernés explique à elle seule le peu d'influence des causes environnementales. En gros: trop peu fréquent et pas assez "nuisible" pour être soit favorisé soit combattu par l'évolution.
. L'ordre de naissance: de toute évidence non lié à la génétique mais potentiellement à la biologie par le rôle des anticorps de la mère qui influeraient sur le fœtus au niveau hormonal, suivant le nombre de frères déjà nés. Joue uniquement pour les hommes et pour le nombre de garçons engendrés par une même mère. La règle: un homme a 2 % de chances d'être homo si il n'a aucun frère, 2,7 % si il a un frère aîné et jusqu'à plus de 5 % si il a plusieurs frères aînés. C'est un des faits les plus établis en matière d'homosexualité masculine. Facilement observable dans les familles nombreuses catholiques ou à titres de noblesse... La source de l'association à priori étonnante mais très vérifiée entre homos et "vieille France". Et aussi entre homos et extrême-droite...
. L'influence des parents: il ne s'agit pas ici d'élever des garçons comme des filles ni de couple homoparentaux, juste des critères basiques de la parentalité: protection et attention, stabilité du cadre familial et confort de base du foyer. Constatation universelle de la sociologie et des statistiques: les parents ont très peu d'influence sur les traits fondamentaux de la personnalité des enfants et encore moins sur leur orientation sexuelle. Vous pouvez influer sur l'expression de l'orientation sexuelle de vos enfants mais pas sur l'orientation elle-même.
  A noter: les thérapies qui prétendent "guérir" ou convertir les homos et les transformer en hétéros sont basées sur une croyance aveugle en les causes environnementales de l'homosexualité. Les études sur les cas d'enfants nés garçons mais élevés comme des filles après opération précoce - ils ne pouvaient pas "savoir" qu'ils étaient en fait des garçons - montrent qu'ils se sentaient pratiquement tous garçons et ils ont tous demandé à changer de sexe par la suite. Soit dit en passant ça colle bien avec mon idée de "Pilote dans l'Esprit" qui sait tout de notre Forme... Ça démontre surtout que l'orientation sexuelle ne vient pas de facteurs extérieurs à l'individu. On ne peut pas passer de homo à hétéro et vice-versa, pas en ce qui concerne la mesure de l'excitation sexuelle physique qui, à la différence des sois-disant convertis, ne ment pas et prouve de manière constante l'échec des thérapies de conversion. On peut choisir de ne plus vivre comme un homosexuel, il est impossible de ne plus être homosexuel quand on l'est déjà. Ne vaut que pour les américains forcés à mentir par le poids de la religion dans leur société, donc...

- Causes sociales:
  Le saint-graal des anti-gays, puisque qu'il revient à dire que les homos se reproduisent entre eux en convertissant ou détournant des hétéros... A noter que le cliché sur les pères distants et les mères trop protectrices est à la frontière entre cette catégorie et la précédente, mais la tonalité générale de l'article c'est qu'il faudrait considérer les pères absent ou les mères abusives comme des "accidents" liés à environnement plutôt que comme des phénomènes de société. Du même ordre: les parents homos, qui n'engendrent pas plus d'enfants homos que les parents hétéros.
 Dans cette catégorie: la théorie de la prophétie auto-réalisatrice. En d'autres termes, laisser les homos exprimer ouvertement leur condition et la considérer comme admissible conduirait à répandre l'homosexualité dans la population.
  Autre idée: 30 % des enfants victimes d'abus sexuels sont des garçons pour seulement 3 % d'hommes homos, alors les homos doivent agresser énormément de garçons et maintenir la proportion par un phénomène de répétition d'une génération à l'autre...
  Autant couper court: les sciences humaines montrent que les facteurs sociaux relèvent du raccourci et de la mauvaise foi caractérisée. La science montre que: la proportion d'homos est stable quels que soient l'époque, le lieu et la société considérés; et que les pédophiles et les homos ne sont pas physiquement excités par les mêmes "objets", en rapport avec l'âge pour les premiers, avec le genre pour les seconds... Les électrodes et les capteurs sur le sexe ne mentent pas.
  Comme tous les mammifères mâles, l'être humain a un tropisme envers les partenaires plus jeunes, qu'ils soient mâles ou femelles. C'est tout.
  Pas plus d'homos chez les grecs antiques qu'en Iran actuel, et pas moins qu'en Russie non plus. Et les homos ne sont pas plus attirés par les partenaires pré-pubères que les hétéros.
  Par contre, une proportion plus importante d'homos ont été victimes d'abus sexuels pendant leur enfance et les homos ont des premiers rapports sexuels avec des partenaires plus âgés. Le premier fait s'expliquerait par une vulnérabilité accrue des enfants homos ( isolement, visibilité...); peut-être... L'explication du deuxième fait est par contre limpide: les homos pubères ont un vivier de partenaires de leur âge très réduit et connaissent déjà les impératifs liés à leur condition de "minoritaires". Ils savent qu'ils doivent être discrets dans le meilleur des cas et se voient vite aiguillés vers les lieux de rencontre du milieu gay qui grouillent de partenaires majoritairement plus âgés... Phénomène encore accentué chez les hommes par la nature "mâle", plus demandeuse de sexe que la nature femelle ( si si, c'est un fait scientifique! Et une différence fondamentale et irréductible qui se traduit par le fait bien mis en valeur dans l'article que les homosexualités mâles et femelles sont très différentes ). Dernière précision sur le sujet: les jeunes homos ne passent ni plus tôt ni plus facilement à l'acte que les hétéros, Tous les enfants éprouvent leurs premiers émois sexuels vers dix ans et passent à l'acte au minimum trois ans après avoir pris conscience de leur orientation sexuelle. La seule différence réside dans la différence d'âge moyenne entre les partenaires au moment du premier rapport. Incidemment, c'était pas mon cas - égalité parfaite - mais c'est celui de mon partenaire, qui est en règle générale plus "homo-typique" que moi... On a une demi-génération de différence ce qui me laisse à penser que sous peu et peut être déjà maintenant, les ados homos peuvent espérer explorer leur orientation sexuelle avec des partenaires de leur âge, ce qui est sûrement un progrès. Même si la logique masculine les poussera juste après dans les bras de partenaires plus âgés pour voir si c'est mieux... ( ça c'est pas dans l'article. )
  Les garçons hétéros ont juste un choix de partenaires 23,25 fois plus grand ( 93 / 2+1+1, voir graphique en début de post....) et la liberté de les choisir dans une infinité de cadres qui ne sont pas totalement dédiés aux rencontres sexuelles, ce que sont les lieux gays, pour la plupart.

Pas de réponse toute faite donc, juste un faisceau de causes plausibles qui doivent se combiner dans des proportions propres à chacun... Avec une forte présomption pour le naturel. La Nature définie l'orientation sexuelle, éducation et culture définissent son expression. A aucun moment n'intervient quoi que ce soit qui ressemble à un choix de l'orientation sexuelle. C'est valable aussi pour les hétéros d'ailleurs, ainsi que pour tous types de sous-catégories déviantes ...  Ce que chacun fait de sa nature profonde, c'est un autre débat.

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